Un site fort chatoyant
Réfléchir c'est mourir.




(écrit en 2018, quelques jours avant mes trente ans)

La trentaine... la trentaine approche, et j'ai fait la paix avec cette étape fatidique de ma courte existence. Si mes vingt ans ne m'avaient guère marqués et que mes vingt-cinq ans furent plus placés sur le signe du bordel existentiel généralisé, j'approche des trente ans plus serein, plus mature, avec le sourire, presque.
C'est aussi l'occasion de regarder d'un oeil curieux ce qui a changé, ou pas, depuis cinq, dix, quinze ans. Et comme je me suis aperçu il y a peu que mes goûts en musique avaient, comme beaucoup d'autre chose, évolués, parlons musique, parlons bonne musique, qui résiste au temps, aux états d'âmes et aux déménagements. Plusieurs périodes furent déterminantes dans ma découverte musicale : remontons le temps et regardons ce que chacune m'a apporté, et ce que j'écoute encore aujourd'hui avec le même plaisir.


Il y a cinq ans :
Aaaah, Paris, au milieu de mon premier taf, je commençais sérieusement à détester cette ville, et passais mon temps entre les musées, le dessin et les catacombes (surtout les catacombes en fait). C'était aussi le temps des free parties dans la campagne normande, et la dernière époque où je me couchais encore régulièrement à six heures du matin plus ou moins bourré.
J'y ai découvert, et écoute toujours :
- Sunn O))) : oui, j'aime le drone, oui, j'aime la grosse musique, oui, un bon riff me met en joie, oui, mes amis ne partagent pas forcément tous mes goûts musicaux. Tant pis pour eux. Sunn O))) c'est de la musique qui se contemple comme un beau paysage.
- Geinoh Yamashiguromi : mais si, ils ont fait la musique de la très bonne adaptation en film animé d'Akira. Leur album Ecophony Gaïa est magnifique.
- Brassens : télécharger son intégrale aura été une très bonne idée. Il y a vraiment des perles partout dans sa discographie, et c'est un plaisir à chanter.



Il y a sept virgule cinq ans (plus ou moins un an) :
Mes études avortées en école d'ingénieur m'ont moins marqué du fait du diplôme (que je n'ai jamais eu) ou des cours (qui m'ennuyaient pour la plupart) que pour toutes les rencontres que j'y ai faites. J'y ai lié plusieurs grandes amitiés, apportant avec elles découvertes culturelles (et beuveries mémorables). Malgré un état émotionnel au plus fort de sa vaste instabilité, j'en garde un souvenir tendre, entre amis, soirées bordéliques, dessin intensif, LAN et jeux de rôle. Et puis, Caen était une belle ville pour les études, avec ses pichets d'embuscade, ses souterrains immenses, et le fameux tram à roulette (qui a été supprimé, comme quoi).
J'y ai découvert, et écoute toujours :
- Sleep : parce que -contrairement à ces rigolos de metalleux- ils ont tout compris : un vrai bon riff, ça s'écoute longtemps, ça s'écoute même une heure entière sans jamais s'en lasser. On est pas là pour larmoyer sur nos vies trop dark oh là là. On est là pour passer un bon gros moment de bonheur avec des basses à faire trembler les meubles.
- Comus : j'écoute peut-être beaucoup de musique de bourrin, mais j’apprécie toujours un bon beau groupe, à ré-écouter de temps à autre, comme on savoure un vin qui vieillit bien.
- Steeleye Span : ils m'ont fait découvrir le folk à l'ancienne. Ces vieilles ballades entraînantes, simples et sans prétention, gardent un charme intemporel.
- Jethro Tull : en fait, j'aime beaucoup le son de la flûte traversière. J'aime aussi le bon rock/folk, les belles paroles, les good vibes. Du coup, j'aime bien Jethro Tull.
- Stupeflip : après avoir entendu parlé de The Hypnoflip Invasion partout, j'ai commencé à écouter. Au début j'avais du mal. La suite, tous les fan de Stup' la connaisse.
- La BO du jeu vidéo the Void : le jeu m'a marqué par sa grande beauté (et sa difficulté lancinante), en partie due à sa musique mélancolique et mystérieuse, planante et sexy. Je n'ai pas relancé le jeu depuis des années, mais la BO tourne toujours régulièrement.
- Popol Vuh : merci Herzog pour tes films, et pour m'avoir fait découvrir Popol Vuh.



Il y a dix ans :
C'était le temps de la prépa, des potes sur les forums d'un internet encore un peu fou, des nuits blanches à bidouiller des linux. Ce n'est pas la période la plus intéressante de ma courte histoire, mais l'été 2008 changea ma vie. Parce que je découvris Electric Wizard. Bon, pas seulement pour ça, mais ça a du jouer.
J'y ai découvert, et écoute toujours :
- ELECTRIC WIZARD ! Je kiffe. C'est tout. Je n'avais jamais encore pourtant fumé de weed à l'époque, mais ça me remplit de bonne énergie.
- Coil (et The Threshold Houseboys Choir) : Un groupe qui parle directement à l'âme. De la musique qui calme l'esprit, qui fait entrer en transe, qui libère.
- Navicon Torture Technologies : un autre groupe qui parle directement à l'âme, mais en la martelant avec une violence inouïe. Ca fait du bien aussi parfois. Il y a un plaisir certain à se laisser porter vers le vide sur ces plages de noise implacables, surtout quand le moral n'est pas là et que les glorieux hurlements électroniques parviennent à gueuler encore plus fort que le mal-être.
- Boards of Canada : au début j'écoutais beaucoup Geogaddi. Maintenant j'écoute plus Twoism. C'est toujours aussi beau.
- Current 93 : il a écrit the Dream of a Shadow of Smoke, et pour ça il mérite de figurer dans cette liste. Je l'écoute moins qu'à une époque, mais il reste une valeur sûre. Rien que d'en parler, j'ai envie de me ré-écouter The Inmost Light.



Il y a (un peu moins de) quinze ans :
J'ai commencé à écouter de la musique au lycée, avec des galettes gravées par mes potes, des galettes de rock et de métal. Et si Behemoth ou Finntroll n'ont pas si bien vieilli (quoique, j'écoute toujours de temps en temps The Forgotten Empire of Dark Witchcraft), certains groupes restent :
- Rammstein. Comme quoi. J'ai du mal à m'en lasser. Ils font toujours le même truc mais ils le font bien. Ca me donne la patate, et gueuler de l'allemand en yaourt c'est toujours agréable.
- Pink Floyd : Les grands gagnants. Écoutés quasi non-stop depuis, j'ai récemment (re)découvert Meddle, je n'arrive pas à m'en lasser. Ecouté dans toutes les circonstances, seul ou avec pleins de gens différents, partout. Leurs derniers albums me laissent toujours autant indifférent, mais pour le reste... fan je suis et je le reste.
- Iron Maiden & Judas Priests : avec modération, mais avec plaisir.



Et encore avant ça, j'ai aussi écouté ce qu'écoutaient mes parents. Et j'écoute toujours :
- Thiéfaine : ses premiers albums surtout. Ils ont bercés les longs trajets en voiture, avec leurs paroles étranges que je ne comprenaient pas toujours. Mais la cancoillotte reste une valeur sûre. Encore bravo, et vive la mort.
- Les Beatles : il n'y avait d'eux que Rubber Soul dans la bibliothèque de mes parents, et -avec leur album blanc- c'est le seul que j'écoute encore.
- Guy Béart : je dois être son plus jeune fan. Mais oui, je le dis, je le clame, j'adore Guy Béart. C'est un peu inégal, mais ça n'a pas tant vieilli, c'est drôle, bien écrit, assez juste. C'est un troubadour de l'ère atomique, avec un étrange zeitgeist.



Il y a aussi des noms qui ne sont pas dans cette liste, des groupes que j'ai écouté longtemps, et dont je me remets parfois encore un morceau, à l'occasion, mais l'extase n'y est plus. Ils m'ont accompagné un temps, nos chemins se sont séparés. C'est la vie.
- Aphex Twin : ça a quand même mal vieilli. Ou alors ai-je été trop déçu par sa lamentable performance au Nordik Impakt 2010 ? Il reste des pistes sympa (Albert Balsam, Stone in Focus, etc.) mais c'est devenu un peu trop répétitif pour mon goût. Merci quand même, pour Drukqs, quelques Analords, et pour d'autres trucs d'une époque qui devient lointaine.
- RJD2 : Trop répétitif, à force.
- Gae Bolg : autant je m'enchaînais ses albums fut un temps, autant j'ai du mal à les écouter maintenant, mis à part un pingouin ou deux. Pas assez subtil. Ses sonorités médiévales ont été remplacées par Malicorne.
- Mansfield Tya : ça reste très beau, mais je vais désormais un peu trop bien pour raffoler d'une musique si triste.
- Mike Oldfield : j'y arrive plus. Un moment, j'aimais beaucoup, maintenant ça coince.



Et pour la suite ? Qui écouterai-je toujours en 2028 ? Quelques pronostics de groupes découverts trop récemment pour être inclus ci-dessus, mais avec un bon potentiel :
- Malicorne : c'est super. Belle musique, belles paroles bien chantées. Je continue de découvrir leur discographie avec un grand plaisir.
- Autechre : comment ai-je pu ne pas les écouter pendant tout ce temps ? Je suis encore dans l'excitation de la découverte, nous verrons si ça continue.
- The Corries : OF TWENTY THOUSANDS OF CROMWELL'S MEN, ONE THOUSAND FLED TAE ABERDEEN, THE REST OF THEM LIE ON THE PLAAAAAAIN... HERE, ON THE HAUGHS OF CROMDAALE § Ils chantent putain de bien. Très pratique aussi pour étoffer son vocabulaire anglois.




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Ca fait quelques temps qu'écrire cette liste me tournait en tête, sur l'air de "ce serait cool à écrire, mais j'ai bien trop la flemme". Je suis content de l'avoir fait au final, ça m'a fait réaliser que les artistes dans cette liste tournent beaucoup autour de certaines sonorités que mon oreille adore (mais que je n'essaierai même pas de décrire avec des mots). Il y a énormément d'autres musiciens que j'écoute, depuis plus ou moins longtemps, mais qui n'ont pas ce charme étrange, et dont je finis souvent par me lasser, comme la plupart des rappeurs ou des métalleux.
La plupart des groupes ce cette liste me sont venu spontanément, ce qui est bon signe. Ils ne représentent que la partie inaltérable de l'immense iceberg de mes goûts musicaux éclectiques. Pourquoi n'y a t-il pas Rainy Season ? Ni Haus Arafna ? Ni Vishuddha Kali ? Ou the Do ? Et Dvorak alors ? The Zombies ? Y'a même pas Pentagram, ni Tangerine Dream, ni Bjork ?
La prochaine fois peut-être.